BOYER AVOCATS

Au cours d’une intervention chirurgicale, monter sur un tabouret pour danser sur une chanson dont les paroles présentent un caractère sexuel dénué d'équivoque un pied sur le respirateur du patient opéré, justifie la mise à pied d'un médecin

Temps de lecture : 3 min.
Publié le : 19/11/2024 19 novembre nov. 11 2024

 


Dans un arrêt du 8 octobre 2024, le Conseil d'État s’est prononcé positivement sur la légalité d’une mise à pied conservatoire d’un professeur des universités praticien hospitalier (PU/PH), alors même qu’elle avait été décidée conjointement par le Directeur général du centre hospitalier universitaire et le président de l'université.[1]


Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat rappelle l’existence d’une procédure de mise à pied particulière face à des circonstances exceptionnelles.


Rappelons que l’autorité disciplinaire des médecins titulaires de la fonction publique hospitalière est détenue par le ministre chargé de la santé et non par le Directeur général du centre hospitalier où exerce les médecins.


L'article 26 du décret du 13 décembre 2021 relatif au personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers universitaires prévoit dans sa partie I que « Lorsque l'intérêt du service l'exige, la suspension d'un agent qui fait l'objet d'une procédure disciplinaire ou d'une procédure pour insuffisance professionnelle peut être prononcée, à titre conservatoire, par arrêté des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé ».


Mais il existe une dérogation à ce principe.


L’article 26 précise en effet dans sa partie II que « Par dérogation au I, dans des circonstances exceptionnelles où sont mises en péril la continuité du service et la sécurité des patients ou celle des étudiants, le directeur général du centre hospitalier universitaire et le président de l'université concernée peuvent décider conjointement de suspendre les activités de l'agent […] »


Dans cette affaire se posait donc la question de savoir si le comportement du médecin PU/PH relevait de cette dérogation et pouvait être qualifié de « circonstances exceptionnelles où sont mises en péril la continuité du service et la sécurité des patients ou celle des étudiants »


En l’espèce, un médecin PU/PH est « monté sur un tabouret pour danser au son de la musique qu'il diffusait, a mis un pied sur le respirateur du patient opéré et fait tomber de la poussière en direction de ce dernier ». Le conseil d’Etat a jugé que ces faits constituaient « un manque avéré de professionnalisme constitutif d’un manque aux devoirs professionnels »


Ce d’autant que ce médecin avait également formulé « des avances de nature sexuelle très directes et répétées » adressées à une étudiante en médecine « en lui proposant une rencontre avec ses fils » et en « diffus[ant] une chanson dont les paroles présent[aient] un caractère sexuel dénué d'équivoque ».


Le conseil d’Etat a alors jugé que « les faits reprochés au médecin PU/PH étaient d'une vraisemblance et d'une gravité suffisantes pour justifier la prise, dans l'attente de l'issue de la procédure disciplinaire engagée à son encontre, d'une mesure de suspension temporaire » par le directeur de centre hospitalier et le président de l'université.


Cette jurisprudence pourrait faire penser que la suspension à titre temporaire par le directeur d’un centre hospitalier est simple à mettre en œuvre. Il n’en est rien.


Au contraire, dans cet arrêt le conseil d’Etat a une analyse restrictive pour juger d’une « réelle vraisemblance et d'une gravité suffisante des faits reprochés » pouvant caractériser « des circonstances exceptionnelles où sont mises en péril la continuité du service et la sécurité des patients ou celle des étudiants ».


Rappelons qu’en dehors de cette procédure exceptionnelle, le directeur général du centre hospitalier universitaire et le président de l'université concernée ne peuvent pas décider d’une mesure de suspension temporaire à l’égard des fonctionnaires médecins PU/PH exerçant au sein de leurs établissements publics.


Au-delà de cet arrêt, se pose peut-être la question du transfert du pouvoir disciplinaire au directeur général du centre hospitalier universitaire et au président de l'université concernée concernant les médecins PU/PH.
 

 

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